Tommy «Tiny» Lister : le géant aux multiples visages.

Dans le paysage du cinéma américain, rares sont les acteurs qui ont su incarner avec autant de force physique et de présence magnétique le rôle du “dur à cuire” tout en cultivant un profond sens de la dérision. Tommy “Tiny” Lister, disparu en décembre 2020, était de ceux-là. Acteur, catcheur occasionnel, figure culte des années 90, il laisse derrière lui une carrière atypique marquée par une grande fidélité au public populaire.

Un physique hors normes, une carrière hors cases

Né en 1958 à Compton, en Californie, Tommy Lister mesure 1m96 et arbore une carrure de colosse. Un handicap pour certains rôles ? Au contraire, pour Lister, ce physique devient son premier rôle : celui du “bad guy” incontournable. S’il commence par le culturisme et un passage remarqué dans le monde du catch sous le nom de "Zeus", c’est au cinéma qu’il trouve son véritable terrain d’expression.

Il devient une figure récurrente du cinéma d’action et des comédies urbaines, jouant souvent des personnages intimidants, violents ou lunaires — mais toujours mémorables.

De Friday à The Dark Knight : une filmographie contrastée

Tommy Lister marque durablement les esprits avec son rôle de Deebo dans Friday (1995), la comédie culte de F. Gary Gray avec Ice Cube et Chris Tucker. Véritable tyran du quartier, Deebo incarne la menace à la fois comique et effrayante, un rôle que Lister reprendra dans Next Friday. Ce personnage, plus grand que nature, devient emblématique de la culture hip-hop des années 90 et fait de lui une icône du ghetto movie.

Mais Lister ne se limite pas à ce registre. Il surprend dans Le Cinquième Élément (1997) de Luc Besson, où il interprète le président du monde fédéral, rôle improbable qui mêle autorité et comédie absurde. On le retrouve aussi dans The Dark Knight (2008) de Christopher Nolan, où, en prisonnier anonyme, il choisit un acte de bravoure dans l'une des scènes les plus fortes du film.

Une figure de la culture pop et de la rue

Lister a toujours entretenu un lien étroit avec le public afro-américain et les milieux hip-hop. Il apparaît dans de nombreux clips, fréquente les cercles rap (notamment Ice Cube et Tupac), et continue de jouer dans des films indépendants à petit budget, souvent issus des quartiers populaires. Il n’a jamais renié ses racines ni cherché à lisser son image : c’est aussi ce qui lui a valu l’affection durable d’un large public.

Un colosse au cœur humble

Derrière ses rôles de brute, Lister était connu pour sa foi chrétienne, son engagement dans des causes sociales et sa gentillesse hors caméra. Sa voix douce et posée contrastait avec ses personnages tonitruants. Son décès brutal à 62 ans, des suites de complications liées au COVID-19, a suscité une vive émotion à Hollywood comme dans la rue.

Tommy “Tiny” Lister restera à jamais ce géant au regard sévère et à l’âme tendre. Il a prouvé qu’un “second rôle” pouvait devenir une légende à sa manière — en imposant une présence unique, sincère et inoubliable.